Dans le contexte : Alors que les tensions s’accroissent autour de la domination des semi-conducteurs, la propriété intellectuelle liée à la fabrication des puces est devenue une cible privilégiée pour l’espionnage. Des entreprises comme ASML et NXP se trouvent au centre de ce champ de bataille technologique stratégique, de sorte que toute violation ne concerne pas seulement les entreprises, mais aussi la géopolitique. Une affaire récente aux Pays-Bas montre jusqu’où certains acteurs sont prêts à aller pour accéder à cette technologie sensible.
German Aksenov, un ancien employé d’ASML et de NXP âgé de 43 ans, a été condamné à trois ans de prison pour avoir partagé des documents sensibles sur la fabrication de puces avec un contact en Russie. Aksenov, un ingénieur des procédés qui, selon son profil LinkedIn, travaillait dernièrement chez NXP, a violé les sanctions imposées par l’Union européenne à la Russie en 2014.
ASML, une société néerlandaise, est le seul fournisseur mondial de machines de lithographie par ultraviolets extrêmes utilisées dans la production de puces avancées. NXP, quant à elle, est une entreprise de semi-conducteurs de premier plan connue pour avoir co-inventé la technologie de communication en champ proche avec Sony. Les deux entreprises sont considérées comme des cibles de choix pour l’espionnage par des acteurs parrainés par des États et des cybercriminels du monde entier.
Cependant, Aksenov n’était pas un pirate informatique. Les autorités néerlandaises l’ont appréhendé en flagrant délit. Il aurait stocké un certain nombre de fichiers confidentiels de ses anciens employeurs sur des clés USB et des disques durs. Ces dispositifs de stockage ont été physiquement transportés à Moscou, où ils ont été remis à des agents du principal service de contre-espionnage russe, le FSB.
Aksenov a également été surpris en train de copier des documents des serveurs d’ASML et de NXP et de les emporter chez lui. Il a tenté de justifier son comportement inhabituel en affirmant qu’il avait besoin d’accéder à ces informations confidentielles pour améliorer ses connaissances « professionnelles » de l’industrie des puces. Il continue de nier être un espion ou avoir intentionnellement introduit clandestinement des secrets commerciaux en Russie.
« J’avais des fichiers d’ASML pour mon propre usage. (…) Ces fichiers étaient-ils autorisés à partir en Russie ? Je ne me suis pas posé la question », a osé dire M. Akesenov.
Les autorités néerlandaises ont condamné l’ingénieur à trois ans de prison, alors que les procureurs avaient requis une peine de quatre ans. Le tribunal a accordé une peine plus légère en raison de l’absence de preuves montrant qu’Aksenov avait été payé pour ses actions. Les autorités n’ont pas non plus été en mesure de déterminer exactement quand les documents sensibles avaient été volés à ses anciens employeurs.
Selon Reuters, NXP a coopéré activement avec les forces de l’ordre au cours de l’enquête. ASML n’a pas confirmé son implication, car le litige relatif à l’affaire est toujours en cours. M. Aksenov a été arrêté en 2023 et est en détention depuis lors. En tant que ressortissant russe, il a le droit de faire appel de la décision du tribunal néerlandais dans un délai de 14 jours.